Follow me little bat [feat Kate]

Minuit. L'heure de la bêtise avait sonné. Sortant des ruelles sombres de Gotham, la jeune femme se dirigea nonchalamment vers le quartier de Metropolis, ayant l'envie d'aller faire un peu de shopping au calme. Enfin shopping, sans payer bien sûr et en s'infiltrant discrètement puisque le centre commercial était fermé et désert à cette heure-ci. Mais rebelle et déjantée, Harley n'appréciait pas l'autorité. C'était donc vêtue d'une tenue à paillettes qu'elle escalada le grillage, s'accroupissant une fois au sol afin d'éviter les caméras de surveillance. En deux trois mouvements agiles digne d'une acrobate, l'arlequin arriva rapidement devant une porte vitrée qu'elle fracassa à l'aide de sa batte de baseball. Pas très discret me diriez-vous mais après tout, peu de gardiens traînaient ici la nuit. Même sans être une espionne hors paire, elle n'aurait aucune difficulté à s'en débarrasser au cas où ils auraient entendu le moindre bruit.

S'avançant dans l'immense hall d'entrée, la blondinette ne put s'empêcher d'ouvrir grand la bouche, ravie de profiter de cette balade nocturne improvisée. Ses hauts talons résonnaient dans la pièce, telle une mélodie rythmée et constante. Par où commencer maintenant ? Il y avait tellement de boutiques de tous les côtés. Resserrant ses couettes, l'ancienne psychiatre de l'asile d'Arkham décida de monter les escalators, dans l'idée de fouiller le premier étage. S'arrêtant devant une belle vitrine remplie de sacs luxueux, elle plissa les yeux, les observant un à un jusqu'à tomber sur celui qui lui plaisait le plus. « Tu es à moi petit sac doré. » Sautillant sur place d'impatience, Harley ne tarda plus et brisa le verre pour récupérer l'objet qu'elle désirait tant. Le plaçant sur son épaule, elle enjamba les morceaux transparents et tranchants, souhaitant s'engouffrer dans la salle regorgée d'autres merveilles.

Zigzagant entre les allées bondées de portiques de vêtements en tous genres, la jeune femme en attrapa quelques uns, les essayant devant un miroir au cadre baroque. L'arlequin s'habilla d'une veste d'un bleu pétant, d'un boa aux plumes jaunes, puis d'un chapeau d'un joli magenta. Riant en voyant son accoutrement, elle s'arrêta net lorsqu'un étrange bruit retint son attention. « Il y a quelqu'un ? » Aucune réponse. Pourtant, elle était sûre d'avoir entendu quelque chose.

Sur ses gardes, Harley observait furtivement les alentours à la recherche du moindre mouvement. Elle n'était pas folle -enfin si- mais elle avait bien entendu un léger bruit tout près d'elle quelques secondes auparavant. S'approchant d'une allée tel un félin souple et gracieux, la jeune femme vérifia que personne ne s'était caché sous les vêtements disposés soigneusement sur des cintres en velours noir. Toujours aucun signe d'un potentiel humain visible. Ressortant sa batte de baseball fétiche, l'arlequin s'avança ensuite vers les cabines d'essayage. Mais tout à coup, une voix féminine s'éleva derrière son dos.

Se retournant rapidement, elle tomba nez à nez avec une femme assez mince mais à la silhouette musclée, qui portant un casque de moto sur la tête. Cette inconnue ne ressemblait guère à un vigil malgré son apparence. « Qui êtes-vous ? » Faisait un pas vers elle, la blondinette aux couettes la regarda sous toutes ses coutures, réfléchissant un court instant afin de trouver un indice sur son identité.

Haussant les épaules d'un air désinvolte, Harleen posa ses mains sur ses hanches avant de lui répondre. « Et bien ça sera de force. » Dit-elle en lui adressant un sourire malicieux. Nullement impressionnée ou intimidée par cette altercation, l'humaine haute en couleur n'était pas prête de quitter les lieux. Après tout, elle ne faisait que commencer sa virée nocturne. « C'est plutôt toi qui devrais m'accompagner dans la prochaine boutique. Ça te dit une soirée shopping entre filles ? » Impatiente de voir sa réaction, la voleuse posa son arme pour enlever les habits qu'elle venait d'essayer, les plaçant dans un grand sac en toile. Premier emprunt de fringues validé.

S'inspirant souvent d'un jeu de cartes, elle étant représentée par la dame de carreau, on pouvait quelques fois retrouver ce symbole sur ses habits. Adorant la nouveauté et les tissus de couleurs flamboyantes, elle passait rarement inaperçue. Le Joker l'ayant choyée avec de nombreux produits et objets luxueux, elle avait acquis un goût particulier pour la mode, de quoi passer des heures dans ce centre commercial.

Bla bla bla... Harleen n'en avait que faire des réflexions de la jeune femme qui souhaitait lui tenir tête. Elle perdait son temps car l'arlequin était têtue et ne renoncerait pas à ses plans du soir. Hors de question qu'une vulgaire inconnue cachée derrière son casque lui gâche sa délicieuse soirée dans ce joli et immense centre commercial. Encore une fois, on l'associa au clown de Gotham mais désormais, l'humaine déjantée se débrouillait seule ou bien traînait avec son nouveau squad.

La voleuse fit les gros yeux lorsque son interlocutrice osa toucher son sac. « Enlève tes sales pattes de là ! » D'un coup sec, elle le tira vers elle, afin d'être certaine qu'on ne lui dérobe pas. La brune lui demanda alors de reposer les affaires qu'elle avait emprunté. Hors de question. Toutefois, elle n'avait pas tort sur un point. Une alarme silencieuse s'était bel et bien déclenchée puisque trois hommes sortirent de nulle part et se postèrent derrière la rabat-joie. « Bonsoir Messieurs. » Les saluant d'un signe de la main, la malicieuse en profita pour prendre ses jambes à son cou lorsque son ennemie se retourna furtivement vers les gardiens qui étaient prêts à se jeter sur les deux femmes. N'ayant aucune envie de finir au poste avec les mains menottées -bien que cela pouvait s'avérer fort amusant- Harley se douta que la motarde allait faire de même ou allait trouver une excuse pour convaincre les agents de sécurité.

Ricanant bruyamment dans les larges allées non éclairées, l'arlequin parcourut plusieurs centaines de mètres avant de s'infiltrer dans le cinéma du centre commercial. Avançant à tâtons, la salle était plongée dans le noir complet. De quoi pouvoir se cacher quelques minutes avant que ses poursuiveurs ne débarquent avec leurs lampes torches. Si jamais elle se faisait démasquée, il serait facile de débusquer devant eux afin de les ralentir.

La partie de cache-cache venait à peine de commencer lorsque des pas se firent entendre dans la salle de cinéma. Si elle avait eu un peu plus de temps, la jeune femme se serait servie une boîte de popcorns caramélisés en attendant que sa nouvelle camarade finisse par semer les trois baraqués. Mais elle n'avait pas l'occasion non plus de profiter du confort des sièges rouges en velours pour regarder un bon film. Quel dommage, elle devra faire l'action, l'animation et le scénario elle-même. Car d'une seconde à l'autre, quelqu'un allait arriver dans son allée pour la tirer de force de là. Décidément, on ne pouvait point faire son shopping tranquillement.

Accroupie entre deux rangées, elle ne tarda pas à entendre une voix féminine qui lui confirma que les agents de sécurité ne les pourchasseraient plus pour le moment, leur laissant quelques minutes de répit. Et voilà enfin un indice sur la femme à la moto. Celle-ci connaissait son prénom. Il était donc évident qu'elle était d'une manière ou d'une autre une ennemie du Joker ou bien d'un compère de l'arlequin. L'ancienne psychiatre allait donc avoir une nouvelle pseudo super-héroïne sur le dos. Encore une godiche qui pensait pouvoir sauver la ville des méchants petits criminels qui ne faisaient que s'amuser.

Soupirant à son tour, Harley sortit de sa cachette. « J'ai une meilleure idée, on va manger un sandwich ! » Surexcitée, l'autre femme l'était beaucoup moins. D'ailleurs, elle fut prête à l'attraper par le bras. L'humaine la poussa alors sur les sièges, avant de détaler derrière l'écran géant. « Eh la grosse pastèque, par ici ! » Sans grande surprise, son assaillante la rattrapa en un rien de temps. La regardant avec un petit sourire en coin, elle lui fit signe de rester silencieuse. De nouveaux gardes déboulèrent en trombe dans la pièce. Les autres avaient sûrement dû appeler des renforts. « On se fait un petit corps-à-corps ? » N'attendant pas sa réponse, l'acrobate se jeta sur l'un des hommes. Cependant, il lui manquait quelque chose. Et merde, sa batte de baseball était restée dans la boutique. Elle devra aller la chercher plus tard. Pour l'instant, elle allait se débrouiller sans.

Et c'était ainsi que la bataille commença. Un coup par-ci un coup par-là. Les deux jeunes femmes se débrouillaient à merveille malgré les tas de muscles qui les encerclaient. Ce n'étaient certainement pas des gros balourds qui allaient réussir à les attraper. Contrairement à eux, elles étaient plus méthodiques et précises dans leurs gestes, ce qui leur donnait un large avantage. Harley esquivait les attaques à la perfection tandis que la brune au visage caché par un casque enchaînait les prises qui ne faisaient que de mettre ses adversaires à terre en un rien de temps. Mais alors qu'il n'en restait plus que deux, l'arlequin reçut un coup brutal dans le bras. « Aïe ! » Elle l'avait fait exprès la petite garce ! Mais pour le moment, pas le temps de lui rendre la monnaie de sa pièce.

Une fois tous les enquiquineurs à terre, la motarde s'empressa de rejoindre la sortie. Quelle lâche ! Elle allait se barrer sans elle sans avoir eu le temps de s'amuser encore un peu. Mais celle-ci s'arrêta net dans son élan en jurant. « Quoi encore ? Les gardiens t'ont mis une raclée ? Tu veux un bisou magie ? » Toujours dans l'ironie et le sarcasme, la jeune femme se résigna à lui ouvrir la porte afin de sortir un instant à l'extérieur.

Dehors, il pleuvait des cordes. « Tu vois, on était mieux à l'intérieur bien que toi tu ne vas pas ruiner ton brushing. » Levant les yeux au ciel, Harley se posa sur le rebord d'un petit muret, la mine boudeuse. « Maintenant dis-moi, ne serais-tu pas une justicière ralliée à Batsy par hasard ? » Bien qu'elle ignorait toujours le nom de son accompagnatrice du soir, elle se mit à douter qu'elle était forcément de mèche avec cette foutue chauve-souris. Il n'y avait que lui et ses coéquipiers pour ruiner sa soirée, faire les rabat-joie et passer leur temps à la chasser alors qu'elle n'avait strictement rien fait.